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VINCENT LABAUME, JEAN-LUC MOULÈNE / Isidore Ducasse - Poésies II





VINCENT LABAUME, JEAN-LUC MOULÈNE
Isidore Ducasse - Poésies II, 2025
ed. Aurélie Noury

[Paris, Librairie Gabrie, 1870], Rennes, Éditions Incertain Sens / Éditions Lorem Ipsum, 2025.
Affiche pliée sous chemise, impression offset recto verso noir et blanc, 29,7 × 21 cm (format plié), 59,4 × 84,1 cm (format déplié).
Dépôt légal juillet 2025, 1000 exemplaires, 3,80 €

ISBN Incertain sens : 978-2-490030-06-4
ISBN Lorem Ipsum : 978-2-918829-11-9

Le point de départ de cette édition se situe à la Bibliothèque nationale de France qui conserve – depuis son dépôt légal en 1870 – le seul exemplaire complet connu de la première édition des Poésies d’Isidore Ducasse en deux volumes. Cet exemplaire – mythique car unique rescapé d’un tirage réputé de 500 – a suscité beaucoup de passion tout au long de l’histoire et donné lieu à une succession de copies manuscrites par plusieurs acteurs de la vie littéraire, se rendant sur place pour recopier l’œuvre en vue d’une diffusion hors les murs. C’est le cas de Rémy de Gourmont en 1890, de Valery Larbaud en 1913 ou d’André Breton en 1919 qui, tour à tour, ont porté ce texte à la (re)connaissance du public.

Bien des décennies plus tard, en mai 2000, Vincent Labaume, alors employé à la librairie Jean-Claude Vrain à Paris, voit transiter un deuxième jeu complet et jusque-là inconnu de l’édition originale des Poésies, qui s’apprête à quitter le territoire suite à son acquisition par un collectionneur étranger. L’exemplaire qui fait surface possède une plus-value précieuse puisque chacun des deux fascicules est augmenté d’un envoi autographe de l’auteur à Eugène Loudun, conservateur honoraire de la bibliothèque de l’Arsenal.
Conscient du caractère exceptionnel de cette réapparition, Vincent Labaume décide de se saisir subrepticement des précieux volumes pour les photocopier, directement sur son lieu de travail, avec la machine à disposition. Ce geste donne lieu à une série de feuillets A4 mobiles sur chacun desquels est reproduite une page des deux fascicules à échelle 1. Jean-Luc Moulène réalise ensuite plusieurs prises de vue des photocopies, venant doubler l’acte de reproduction. L’ensemble constituant le premier volume des Poésies est alors mis en page, imprimé et plié à la manière d’une feuille d’imposition à déployer, laissant apparents certains effets visuels dus à la photocopie : marges tournantes, bougés, biais ou décalages. Cette reconstitution présente un ensemble homogène porté tant par l’éventail des gris créé par la technique de la photocopie, que par le dévoilement des ficelles du façonnage, tous au service du texte de Ducasse, restitué dans une beauté sobre.
Cette même année 2000, la conservatrice du musée d’Art moderne de la Ville de Paris, Suzanne Pagé, choisit d’intégrer la pièce à l’exposition « VOILÀ, le monde dans la tête », en faisant imprimer plusieurs milliers d’exemplaires de l’affiche, mise à la disposition gratuite du public. On oppose alors une dispersion libre et généreuse, à l’extrême confidentialité de cette édition dont l’exemplaire de la BnF constitue la matrice.

25 ans après, les Éditions Lorem Ipsum et Incertain Sens s’associent pour publier le volume II des Poésies dont le lot de photocopies n’a jusque-là pas été exploité. Part manquante de l’ouvrage, ce second volume a lui aussi bénéficié d’un principe de double reproduction préférant cette fois – dans une perspective de documentation – le scanne des photocopies initiales, plutôt que la photographie. Autre différence, si l’édition de 20 pages prend toujours la forme d’une feuille d’imposition de format A1, elle est présentée sous une chemise-couverture escamotable.
Dans une volonté de poursuivre une diffusion facilitée, ce volume est vendu au prix de 3,80 euros, conversion actuelle du prix affiché du fascicule en 1870, à savoir 1 franc.

Au terme de ces événements, il apparaît que le texte de Lautréamont ne sera finalement parvenu au public que par le biais de la copie : celles à la main de tout ou partie de l’exemplaire de la BnF, dont la parution par André Breton dans la revue Littérature constitue la version la plus complète, et celle – dans un contexte contemporain – de Vincent Labaume et Jean-Luc Moulène utilisant la photocopie, la photographie et le scanne. Les acteurs impliqués accomplissent finalement un même geste, à près d’un siècle d’intervalle : un geste de copie, puis de remédiation en vue d’une diffusion à toutes et tous par les moyens de l’imprimé.


Cet ouvrage a bénéficié du soutien de l’unité de recherche Pratiques et Théories de l’Art Contemporain (PTAC) et  de l’école doctorale Arts, Lettres, Langues - Bretagne (ALL) de l'Université Rennes 2.